Newsletter rédigée avec 💛 par Antoine Géraud, fondateur de docteurlove.co
La semaine dernière, je me suis réinscrit sur une app de dating. Bumble en l’occurence.
Pas parce que je suis redevenu célibataire, ni par penchant masochiste, mais parce que je travaille sur un nouveau projet.
Et pour cela, j'avais besoin de me mettre dans la peau des utilisatrices et de comprendre leur quotidien, de comprendre pourquoi le niveau d’insatisfaction de la gente féminine envers les apps étaient aussi élevés.
Et quoi de mieux que d'aller directement chercher des témoignages “sur le terrain” ?
J'ai mené des entretiens en visio ou par téléphone avec 25 femmes, âgées de 20 à 50 ans. Pendant 30 minutes, elles se sont livrées en toute transparence, partageant leurs expériences, leurs émotions, leurs joies, et leurs frustrations.
Malgré mes huit années d'expérience dans le secteur, je croyais tout savoir, avoir tout vu et entendu. J'avais tort.
Voici les principaux enseignements que j'ai tirés de ces échanges :
La sécurité avant tout : 20 femmes interrogées sur 25 m’ont dit partager systématiquement les détails d’une première rencontre avec leur meilleure amie : l’adresse, l’heure, le numéro de téléphone du type si elles l’ont. Ce type de protocole de sécurité semble être devenu la norme. Je savais que c’était une crainte, mais pas à ce point-là.
Une overdose de like : les femmes sont noyés de likes, moins d’amour. 1000, 1500, parfois même 3000 : les chiffres sont ahurissants. "C'est cool au début, mais ça devient vite vide", m'a confié Emma, 28 ans. Tu m’étonnes.
Fatigue décisionnelle : un terme qui est revenu très souvent. Avoir des milliers de likes, c'est une montagne de micro-décisions à prendre. Qui choisir ? Qui vaut vraiment le coup ? Face à la surcharge de choix, les utilisatrices finissent souvent par ne plus avoir l'énergie d'aller plus loin. La recherche d'un partenaire devient un marathon émotionnel. Chaque swipe, chaque message, chaque évaluation finissent par peser. Trop de choix, c'est souvent l'équivalent d'aucun choix. "J'ai l'impression de devoir passer des heures à trier des CV juste pour un date," m'a confié Laura (prénom modifié), 31 ans. "Ça m'épuise."
Asymétrie des expériences avec les hommes : la majorité des femmes interviewées croient sincèrement que les hommes ont une expérience similaire à la leur. "Je pensais que les mecs avaient aussi plein de matchs," m'a dit Sofia (prénom modifié), 26 ans. En réalité, c'est la fameuse loi de Pareto qui s'applique aux apps de dating : 20 % des hommes reçoivent 80 % des likes. Les applications de rencontre sont extrêmement inégalitaires du côté masculin, avec une élite d'hommes qui accaparent la majorité de l'attention, laissant la grande majorité des autres lutter pour un simple match. Cette méconnaissance de la distribution des likes crée des incompréhensions des deux côtés.
Une quête obsessionnelle du coup de foudre : Pour beaucoup des femmes interviewées, l'amour commence par un coup de foudre. Si l'étincelle n'est pas immédiate, elles n'ont pas envie d'aller plus loin. Cette vision de l'amour instantané ressemble à ce que Yuval Noah Harari appelle le "consumérisme romantique" : l'amour est devenu un produit, consommé pour l'intensité de l'instant. Sans cette sensation, elles passent au suivant, dans l'attente perpétuelle du frisson parfait. "Je veux sentir des papillons tout de suite. Si ce n'est pas là, ça ne sert à rien de continuer," m'a expliqué Julie (prénom modifié), 29 ans.
Un rapport toxique aux apps : Ce qui m'a marqué, c'est à quel point certaines utilisatrices vivent un cycle addictif avec les applications de rencontre. Elles s'inscrivent, passent une semaine à swiper frénétiquement, finissent déçues et se désinscrivent, pour ensuite récidiver. "C'est comme un cercle vicieux," m'a dit Violette (prénom modifié), 37 ans. "Je me dis à chaque fois que je vais arrêter, mais je reviens toujours, en espérant que cette fois ce sera différent." Cette boucle rappelle les comportements de dépendance : l'espoir récurrent d'un résultat positif, qui ne vient jamais vraiment, renforçant chaque fois l'insatisfaction.
Rapport ambivalent à la sexualisation des échanges : le rapport des femmes à la sexualisation des discussions est complexe. Beaucoup m'ont parlé du dégoût qu'elles ressentent face aux messages ouvertement sexuels envoyés par certains hommes. "Ca me saoule vraiment, ça arrive tout le temps," m'a confié Sarah (prénom modifié), 25 ans. Mais paradoxalement, elles étaient nombreuses à avouer qu'elles appréciaient aussi, de temps en temps, jouer avec cette dynamique pour un égo boost. "Des fois, c'est juste drôle de chauffer un mec, sans intention de le rencontrer," a ajouté Amélie (prénom modifié), 24 ans.
L'insécurité affective et l'époque de la méfiance : Ce n'est pas seulement la sécurité physique qui inquiète ces femmes. L'insécurité affective est également très présente. Avant chaque rencontre, elles passent souvent les profils au crible : Google Image inversée, stalking sur les réseaux sociaux… "Je vérifie tout avant de le rencontrer," m'a dit Élodie (prénom modifié), 40 ans. "Je veux être sûre qu'il est bien celui qu'il prétend être."
Les “amoureux anonymes” : De plus en plus de mini-communautés se forment autour du dating, comme des groupes WhatsApp ou des dîners hebdomadaires dédiés aux histoires d'amour (mais aussi des groupes facebook comme j’en parlais dans ma dernière newsletter). Ces communautés permettent de partager des anecdotes, d’échanger des conseils, et d’offrir un soutien émotionnel. Cela semble être devenu un pilier dans la vie affective de nombreuses utilisatrice. L’une m’a clairement dit que “sans cela, elle n’aurait jamais tenu sur les apps”.
La “vraie vie” : un idéal séduisant mais rare : beaucoup de femmes m’ont confié qu’elles préféreraient rencontrer quelqu’un dans la “vraie vie” — dans un bar, lors d’une soirée, ou au détour d’une rencontre fortuite. Pour elles, ces moments sont perçus comme plus beaux, plus authentiques, voire plus romantiques. Pourtant, elles admettent que ce genre de rencontre devient de plus en plus rare. “Ça fait rêver, mais dans la réalité, c’est devenu super rare” m’a confié Léa (prénom modifié), 33 ans. Cette dissonance entre le fantasme de la rencontre spontanée et les réalités du quotidien alimente encore davantage leur insatisfaction vis-à-vis des apps, qui semblent être devenues un passage obligé, malgré leurs défauts.
Ces témoignages mettent en lumière une réalité complexe : malgré un désir souvent exprimé de faire des rencontres dans la “vraie vie”, les femmes n’ont souvent pas le choix que de se tourner vers les apps, où elles font face à des défis récurrents comme la fatigue émotionnelle, la surcharge de choix, et l’insécurité affective. Les mini-communautés et groupes de soutien sont devenus des espaces essentiels pour traverser cette expérience parfois frustrante.
Aujourd’hui, le véritable enjeu est de repenser l’expérience des rencontres en ligne, pour qu’elles ne soient plus perçues comme une obligation par défaut, mais comme une véritable opportunité de créer des connexions authentiques, sans l’épuisement et la méfiance qui les accompagnent souvent.
Sacré challenge.
Antoine Géraud
Fondateur de docteurlove.co
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Bonjour Antoine vu de mon grand âge je trouve pitoyable tout ce que vous avez découvert, cette génération est bien malheureuse ..
Il faudrait juste que les choses changent que les personnes soient honnêtes, je ne me retrouve pas du tout dans tout cela.
C’est sûrement pour cela que rien n’est venu depuis plus de 10 ans que je suis seule…..
Amicalement.